“À 47 ans, avec plus de 20 ans d’expériences dans le design, je me demande souvent si l’âge est vraiment un handicap dans le monde de la créativité. Mon parcours m’a appris que ce n’est pas l’âge qui compte, mais l’envie d’apprendre et de créer sans cesse.”

Le parcours du créatif sénior

À l’heure où l’on parle d’allongement des carrières, je m’interroge sur la valeur de mon expérience dans un monde qui valorise tant la nouveauté. On entend dire que créativité rime avec jeunesse … ce qui sous-entend que lorsque l’on devient un senior, on est “has-been” (sachez que l’on on est considéré senior à l’âge de 45 ans 😉 …)

Après avoir consulté mon compte retraite, j’ai découvert que je toucherai ma retraite à taux plein à 67 ans. Je dois donc potentiellement travailler encore 20 ans. Diplômée de l’école Boule en 1998, j’ai 26 ans d’expérience dans le domaine du design, de la communication, du graphisme … Le métier a énormément évolué et changé. J’ai connu le monde sans ordinateur, sans logiciels de graphisme, sans internet, sans appareils photo numériques, sans réseaux sociaux, sans IA … j’ai donc vécu le passage de l’imprimé au numérique. Cela fait 26 ans que je m’adapte, que je me forme, que j’évolue au rythme des nouvelles technologies.Le changement est perpétuel et continue. Cette adaptabilité constante est une qualité que j’ai dû cultiver au fil des années et qui est aujourd’hui une ressource inestimable.

La valeur de l’expérience dans un monde en mutation

Dès que je suis sortie de l’école, il a fallu que j’y retourne et que je me forme aux outils numériques. Cela a été pour moi une révolution et cela m’a ouvert les portes d’un métier qui est encore le mien aujourd’hui.

Ensuite, j’ai découvert le monde de l’édition et de l’imprimerie. Il m’a fallu encore apprendre. Comprendre et maîtriser toute la chaîne graphique. Composer (Publication Assistée par Ordinateur), flasher et sortir les films, puis insoler des plaques qui serviront à imprimer dans les presses Offset en quadrichromie (CMJN). Ce fut mon métier durant 11 ans. Mais aussi, accueillir, conseiller la clientèle, deviser et jusqu’à donner un coup de main à l’atelier pour façonner puis livrer.

Puis, j’ai travaillé dans une agence de communication qui était spécialisée dans la création de sites internet. Arrivant du monde du PRINT, il m’a fallu à nouveau me mettre en posture d’apprentissage et de formation.

Désormais, depuis 7 ans au commande de mon entreprise, je suis devenue webdesigner et je continue d’apprendre, de rester curieuse face à la montée en puissance des réseaux sociaux et des IA. Mon expérience me donne les outils et l’agilité nécessaire pour rester continuellement en veille et en alerte.

Plusieurs de mes clients me font cette remarque : “on aime travailler avec toi car tu es à l’écoute et tu n’hésites pas à remettre en question tes propositions”.

Oui, mon objectif principal est que le client soit content et se sente bien avec son identité visuelle. Car à la fin du processus créatif, le logo, l’univers graphique n’appartiennent plus au graphiste. Ils deviennent l’habillage de l’entreprise. Donc oui, je n’hésite pas à revoir ma copie et à faire évoluer mon travail.

Expérience vs Jeunesse : une complémentarité essentielle

Le brassage générationnel est à mon sens la meilleure équation. Il est important de mixer les équipes de travail ; le point de vue des plus jeunes peut être rafraîchissant, mais l’expérience permet de poser un cadre, de donner une profondeur aux projets et de gagner en efficacité.

Il me semble intéressant d’observer les nouvelles “vibes vintages” qui s’affichent sur les réseaux sociaux et même sur les nouveaux design de sites internet. On retrouve des effets graphiques, des blocs et des typographies utilisés dans les années 80. Ce n’est que l’expression des croisements de générations.

Dans le collectif Woody, que nous avons créé en 2020, les membres ont entre 30 et plus de 50 ans. Cette variété de profils et de types d’expériences sont les fondements de notre complémentarité.

La créativité n’a pas d’âge

L’âge ne devrait jamais être un obstacle dans les métiers créatifs, tant que la passion, la curiosité et le plaisir de créer demeurent.

Il faut fuir la routine qui nuit à l’originalité des idées. Le risque étant que plus on a d’expérience, moins on fait d’expériences. Personnellement, j’aime me confronter à de nouvelles expérimentations qui renforcent ensuite mes offres de services.

Être senior est aujourd’hui une force et un atout dans les métiers créatifs. Il peut apporter un autre point de vue sur le monde et la création, être singulier et efficace.

“Après tout, la créativité se nourrit des expériences vécues, et si elle n’a pas d’âge, elle ne manque jamais de maturité.”